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Les oeuvres de Bernard Lonergan |
Avant-proposa
Un bon roman policier offre tous les indices d'un crime, mais sans en donner la clé. Le lecteur a beau se concentrer sur chaque indice, le dénouement de l'intrigue lui échappe. Il ne peut résoudre cette énigme par l'appréhension de chacun ou de l’ensemble des indices. Pour trouver l'auteur du crime, il lui faut plutôt déployer une tout autre activité de l'intelligence organisatrice qui situe l'ensemble complet des indices dans une même perspective explicative. Il importe donc de souligner que par « insight » je n'entends pas un acte d'attention ou de mémoire. L'insight, c'est la survenue de l'acte de compréhension. Et cet acte ne tient pas d'une obscure intuition. L'insight est l'événement familier qui se produit fréquemment, sans difficulté, chez une personne modérément intelligente, mais rarement et à grand-peine chez les gens très stupides. Cet acte est si simple, si évident en soi, qu'il ne semble pas mériter plus que l'attention minime dont il est habituellement l'objet. Par ailleurs, son rôle dans l'activité cognitive est tellement crucial qu'une saisie de ses conditions, de son fonctionnement et de ses résultats confère une unité étonnante — aussi élémentaire soit elle — à l'ensemble des opinions et des interrogations des humains. Une telle saisie a des implications dont la multitude même a de quoi déconcerter. Et il nous est difficile d'indiquer de façon simple et concise l'objet du présent ouvrage, de dire comment un seul auteur peut envisager de traiter toute la variété des sujets qu'annonce la table des matières, pourquoi il convenait d'aborder tous ces sujets en un même ouvrage, et quel profit il peut espérer tirer d'une démarche aussi curieuse, si jamais il réussit dans son entreprise. Un avant-propos doit pourtant esquisser une réponse à de telles questions. Je peux peut-être entreprendre cette démarche en posant que l'objet de l'ouvrage est de communiquer aux lecteurs un insight dans l'insight. Les mathématiciens recherchent des insights dans des ensembles d'éléments, les scientifiques, des insights dans des gammes de phénomènes, et le monde du sens commun, des insights dans les situations concrètes et les affaires pratiques. Quant à nous, notre propos est de parvenir à l'acte de l'intelligence organisatrice qui situe dans une même perspective les insights des mathématiciens, ceux des scientifiques et ceux du sens commun. Les sujets de la table des matières ne sont donc pas si disparates que peut le laisser entrevoir une lecture superficielle. Le présent ouvrage ne sera pas directement utile à qui veut devenir mathématicien ou scientifique ou s'initier au monde du sens commun. À l'instar des physiciens qui étudient la forme des ondes et laissent les chimistes s'occuper de l'analyse de l'air et de l'eau, nous nous préoccupons, non pas des objets des mathématiques mais des actes de compréhension des mathématiciens, non pas des objets compris dans les diverses sciences mais des actes de compréhension des scientifiques, non pas des situations concrètes maîtrisées dans le monde du sens commun mais des actes de compréhension aux sources d'une telle maîtrise. De plus, même si tous les actes de compréhension présentent certains traits de ressemblance, il n'est possible d'en obtenir une vue globale et équilibrée que dans un exposé alignant des faits recueillis dans différents domaines de l'activité intelligente. Ainsi, la nature précise des actes de compréhension sera perçue de façon plus claire dans les exemples tirés des mathématiques. Le contexte dynamique où se produit la compréhension est mis en lumière tout particulièrement dans une exploration des méthodes scientifiques. L'effet perturbateur de préoccupations contraires sur ce contexte dynamique se manifeste par la façon où souvent, à divers degrés, le non-sens commun se mêle au sens commun. L'insight n'est toutefois pas seulement une activité mentale. C'est aussi un facteur constitutif de la connaissance humaine. L'insight dans l'insight représente donc en un sens une connaissance de la connaissance. Une telle connaissance de la connaissance apparaît en fait extrêmement pertinente pour toute une série de problèmes fondamentaux en philosophie. C'est ce que je dois maintenant essayer d'indiquer, même si je ne peux le faire que de façon rapide et sommaire, en employant des termes sans les définir et en présentant des arguments sans les étayer suffisamment. Première observation : c'est l'insight qui fait la différence entre le problème obsédant et la solution évidente. Il semble donc que la source des idées claires et distinctes chères à Descartes soit justement l'insight. L'insight dans l'insight sera par conséquent la source d'idées claires et distinctes des idées claires et distinctes. Deuxièmement, vu qu'il est l'acte de l'intelligence organisatrice, l'insight est une appréhension de relations. Or au nombre des relations figure la signification, puisque la signification semble être une relation entre un signe et un signifié. L'insight inclut donc l'appréhension de la signification, et l'insight dans l'insight inclut l'appréhension de la signification de la signification. Troisièmement, en un sens un peu différent de celui donné par Kant à ces termes, chaque insight est à la fois a priori et synthétique. A priori, parce qu'il dépasse ce qui est simplement présent aux sens ou à la conscience empirique. Synthétique, parce qu'il ajoute à ce qui est simplement présent une unification ou une organisation explicative. Il semble donc, en conséquence, que l'insight dans l'insight permettra une explication synthétique et a priori de la gamme entière des éléments synthétiques a priori de notre activité cognitive. Quatrièmement, une unification et une organisation d'autres domaines de la connaissance constituent une philosophie. Or chaque insight réalise une unification et une organisation. L'insight dans l'insight unifiera et organisera donc les insights des mathématiciens, des scientifiques et du monde du sens commun. Par conséquent, l'insight dans l'insight produira semble-t-il une philosophie. Cinquièmement, il est impossible d'unifier et d'organiser le connaître sans conclure à une unification et à une organisation du connu. Or une unification et une organisation de ce qui est connu en mathématiques, dans les sciences, et par le sens commun constituent une métaphysique. Dans la mesure où l'insight dans l'insight réalisera une unification et une organisation de l'ensemble de notre connaître, il impliquera donc une métaphysique. Sixièmement, la philosophie et la métaphysique résultant de l'insight dans l'insight seront vérifiables. De même que les insights scientifiques émergent et sont vérifiés dans les couleurs et les sons, les goûts et les odeurs, de l'expérience ordinaire, l'insight dans l'insight émerge et est vérifié dans les insights des mathématiciens, des scientifiques et du monde du sens commun. Or si l'insight dans l'insight est vérifiable, la philosophie et la métaphysique qui en résultent seront aussi vérifiables. Autrement dit, comme il peut être démontré que chaque affirmation en science théorique implique des affirmations au sujet du fait sensible, ainsi peut-il être démontré que chaque affirmation en philosophie et en métaphysique implique des affirmations au sujet du fait cognitif. Septièmement, l'être humain a des insights, mais il commet parfois des méprises (oversights). Il parvient à se situer dans le contexte dynamique de la recherche détachée et désintéressée où les insights surgissent avec une fréquence notable, mais il se retrouve aussi dans les contextes dynamiques contraires de la fuite de la compréhension où les méprises (oversights) se produisent de façon régulière et, on pourrait dire, systématique. Si l'insight dans l'insight ne doit pas être une méprise à propos d'autres méprises (an oversight of oversights), il faut donc y intégrer un insight sur les principaux mécanismes de la fuite de la compréhension. Huitièmement, la fuite de la compréhension dont il sera question dans cet ouvrage sera tout à fait autre chose qu'une aberration singulière dont seraient affectés uniquement les esprits malheureux ou pervers. Dans sa forme philosophique (qui ne se confond pas avec ses manifestations psychiatriques, morales, sociales et culturelles) la fuite de la compréhension semble découler simplement d'un développement incomplet dans l'usage intelligent et rationnel que la personne fait de son intelligence et de sa rationalité. Mais si elle provient de la simple absence d'un développement complet, cette fuite a néanmoins des conséquences tout à fait positives. La fuite de la compréhension bloque en effet l'avènement des insights qui bousculeraient son équilibre confortable. Et elle ne se limite pas à être simplement une résistance passive. Furtive et dissimulée, elle n'en est pas moins ingénieuse et inventive, efficace et terriblement plausible. Elle peut revêtir une très grande variété de formes; et elle peut changer lorsqu'une forme paraît intenable. Elle pourvoit toujours volontiers les esprits superficiels de positions superficielles, mais est tout à fait capable d'élaborer une philosophie si pénétrante et si profonde que pendant des siècles ensuite les esprits d'élite cherchent en vain à en dévoiler les faiblesses. Neuvièmement, de même que l'insight dans l'insight fournit une idée claire et distincte des idées claires et distinctes, de même qu'il comporte une appréhension de la signification de la signification, de même qu'il dévoile la gamme des éléments a priori et synthétiques de notre connaissance, de même qu'il comporte une unification philosophique des mathématiques, des sciences et du monde du sens commun et de même qu'il permet une présentation métaphysique de ce qui peut être connu dans les divers départements de la recherche, ainsi l'insight dans les divers modes de la fuite de la compréhension permettra d'expliquer 1) la gamme des idées en apparence claires et distinctes mais en réalité confuses, 2) les conceptions aberrantes de la signification de la signification, 3) les déformations des éléments a priori et synthétiques de notre connaissance, 4) la pluralité des philosophies, et 5) l'ensemble des positions métaphysiques et anti-métaphysiques erronées. Dixièmement, il semble possible, en conséquence, d'élaborer une philosophie à la fois méthodique, critique et globale. Globale : elle embrasse en un même point de vue toutes les affirmations de toutes les philosophies. Critique : elle permet de faire une distinction entre les produits du désir de comprendre désintéressé et détaché et les produits de la fuite de la compréhension. Méthodique : elle remonte des affirmations des philosophes et des métaphysiciens aux origines de ces affirmations dans leurs activités cognitives et permet de déterminer si ces activités sont aberrantes ou non en faisant appel, non pas aux philosophes ni aux métaphysiciens, mais aux insights, aux méthodes et aux procédés des mathématiciens, des scientifiques et du monde du sens commun. Le présent ouvrage opère donc, pourrait-on dire, à trois niveaux, qui concernent une étude de la compréhension humaine, un dévoilement des implications philosophiques de la compréhension et une campagne contre la fuite de la compréhension. Ces trois niveaux sont solidaires. Sans le premier, le deuxième n'aurait pas de fondement et le troisième n'aurait pas de signification précise. Sans le deuxième, le premier ne serait au plus qu'un ensemble d'énoncés élémentaires et le troisième n'aurait aucun impact. Sans le troisième, le deuxième ne serait pas crédible et le premier serait négligé. On me dira probablement que j'ai voulu manœuvrer sur un front trop vaste. Deux raisons me poussent à une entreprise d'une telle envergure. La construction d'une philosophie, comme celle d'un navire, est une œuvre nécessairement globale. Tout effort qui est en principe incomplet en ces domaines représente un échec. De plus le combat contre la fuite de la compréhension ne souffre pas de demi-mesure. Seule une opération stratégique globale a des chances de réussir. Négliger une forteresse quelconque de la fuite de la compréhension, c'est laisser intacte une base d'où sera déclenchée bientôt une contre-offensive. Si le bien-fondé de mon propos est reconnu, on me dira tout de même qu'un tel programme exige la réalisation d'une recherche organisée par de nombreux spécialistes dans beaucoup de domaines différents. J'en conviens, évidemment. Je suis loin d'être un spécialiste compétent dans la plupart des nombreux domaines dont l'activité est marquée d'insights, et je serais heureux certes de bénéficier de l'apport formidable de compétences et de ressources financières liées à un projet de recherche collectif. Mon entreprise diffère toutefois d'un projet de « recherche » au sens habituel. Mon propos n'est ni l'avancement des mathématiques ni une contribution à un domaine scientifique spécialisé. Je cherche simplement un terrain commun où puissent se rencontrer les êtres humains intelligents. Il m'a paru nécessaire de reconnaître que le terrain recherché était plutôt insaisissable à une époque où ni les mathématiciens ni les scientifiques ni le monde du sens commun ne connaissaient vraiment grand-chose au sujet de l'insight. Il fallait entreprendre un voyage préliminaire, exploratoire dans une région malheureusement négligée. Il importait que des spécialistes de différents domaines aient la chance de découvrir l'existence et l'importance de leurs insights; ainsi pouvais-je espérer que certains d'entre eux discernent mon intention malgré les faiblesses de l'expression de mon propos, qu'ils corrigent mes fautes d'ignorance et emplissent de leurs vastes connaissances les structures dynamiques — et toutefois formelles — que j'ai essayé d'ériger. Seule la réalisation des espoirs formulés permettra l'émergence de la collaboration spontanée qui doit d'ordinaire précéder la planification d'une recherche organisée. Une autre question se pose : quel avantage pratiqueb peut-on escompter d'un tel ouvrage? La réponse à cette question s'impose avec une étonnante netteté. Car l'insight n'est pas seulement la source de la connaissance théorique mais aussi de toutes ses applications pratiques et en fait de toute activité intelligente. L'insight dans l'insight permettra donc de révéler quelles activités sont intelligentes, et l'insight à propos des méprises (insight into oversights) quelles activités sont inintelligentes. Or être pratique, c'est agir intelligemment, et manquer d'esprit pratique, c'est accumuler les gaffes. L'insight portant à la fois sur l'insight et sur la méprise constitue donc la clé même de l'esprit pratique. L'insight dans l'insight met donc en lumière le processus cumulatif du progrès. Les situations concrètes donnent lieu à des insights qui se traduisent par des lignes de conduite et des plans d'action. Une intervention active transforme les situations existantes et donne lieu à d'autres insights, à des lignes de conduite meilleures et à des plans d'action plus efficaces. Par conséquent, si l'insight se produit, il continue de se produire. Chaque nouvel insight entraîne un développement des connaissances, un élargissement de la portée de l'action et une amélioration des situations. De même, l'insight à propos de la méprise (insight into oversight) révèle le processus cumulatif du déclin. Car la fuite de la compréhension bloque les insights qu'exigent les situations concrètes, ce qui donne lieu à des lignes de conduite inintelligentes et à des plans d'action ineptes. La situation se détériore et exige de nouveaux insights; ceux-ci étant bloqués, les lignes de conduite deviennent encore plus inintelligentes et les plans d'action plus ineptes. Le pire c'est que la situation en voie de détérioration semble fournir aux esprits non critiques, souffrant de distorsion cognitive, des preuves factuelles justifiant à leurs yeux leur distorsion cognitive. L'intelligence apparaît de plus en plus inopportune pour la conduite de la vie pratique. L'activité humaine s'installe dans une routine décadente et l'initiative devient le privilège des esprits violents. Malheureusement, progrès et déclinc se combinent comme le font communément insights et méprises. Notre soif de vérité s'allie à une mentalité pratique équivalant à un obscurantisme. Nous nous appliquons à corriger les maux anciens avec une passion qui entraîne l'échec du bien nouveau. Nous ne sommes pas purs. Nous vivons de compromis. Nous cherchons à nous tirer d'affaire par de tels arrangements. Le progrès même de la connaissance entraîne toutefois l'émergence d'un pouvoir sur la nature et sur les humains qui est trop grand et trop terrible pour être confié à des esprits bien intentionnés mais souffrant de distorsions cognitives inconscientes. Il nous faut apprendre à distinguer nettement le progrès et le déclin, apprendre à encourager le progrès sans favoriser le déclin, apprendre à enlever la tumeur de la fuite de la compréhension sans détruire les organes de l'intelligence. Il n'est pas de problème à la fois plus délicat, plus profond, plus pratique, voire plus pressant. Comment un esprit peut-il prendre conscience de sa propre distorsion cognitive, en fait, si cette distorsion cognitive provient d'une fuite de la compréhension collective et est renforcée par la texture globale d'une civilisation? Comment peut-on communiquer une nouvelle force et une nouvelle vigueur au désir détaché et désintéressé de la compréhension sans que ce renforcement agisse comme une distorsion cognitive supplémentaire? Comment l'intelligence humaine peut-elle espérer prendre en main les situations inintelligibles et pourtant objectives que la fuite de la compréhension crée, et développe, et nourrit? Nous pouvons à tout le moins commencer par nous demander ce qu'est au juste la compréhension, quelle est la dynamique du courant de conscience qui favorise l'insight, quelles interférences favorisent la méprise (oversight) et, enfin, quelles sont les conséquences des réponses à ces questions pour l'orientation de la pensée et de l'agir humains. L'introduction exposera de façon plus exacte l'objet et la structure du présent ouvrage. Je dois conclure cet avant-propos par une mention brève de tous ceux à qui je suis redevable. Bien sûr il faudrait énumérer en premier lieu les professeurs et les auteurs qui ont exercé sur moi une influence déterminante depuis mon initiation à la philosophie il y a vingt-huit ansd. Cette période représente cependant une si longue recherche, dont une si grande partie a été investie dans une lutte profonde contre ma propre fuite de la compréhension, et mon lent développement a été marqué par tant de détours et de zones de clair-obscur, que ma gratitude sincère ne peut s'exprimer d'une façon brève, exacte et en même temps intelligible. J'ai donc choisi de mentionner ceux dont la contribution à mon ouvrage est plus tangiblee : le personnel de l'Immaculée-Conception à Montréal où a été entreprise la recherche historique parallèle1, le personnel du Jesuit Seminary à Toronto où a été rédigé le présent ouvrage, le p. Eric O'Connor du Collège Loyola de Montréal, toujours disposé à me faire profiter de ses connaissances mathématiques et scientifiques, le p. Joseph Wulftange, le p. Joseph Clark, le p. Norris Clarke, le p. Frederick Crowe, le p. Frederick Copleston, et le p. André Godin, qui ont eu l'obligeance de lire le manuscrit et dont les encouragements et les critiques restreintes, dans leurs divers secteurs de compétence, m'ont permis de percevoir que je n'avais pas entièrement tort dans ma démarche; et enfin le p. Frederick Crowe de nouveau qui a entrepris la tâche fastidieuse de l'établissement d'un indexf. a Avant-propos : Il s'agit d'une nouvelle préface, rédigée au cours de l'été 1954 (que Lonergan passa en Angleterre). Ses entretiens avec T. Michael Longman au mois de juillet persuadèrent Lonergan de rédiger cette nouvelle version, dont une lettre provenant de chez Longman, datée du 26 août, accusa réception. Pour plus de détails voir METHOD: Journal of Lonergan Studies 3, 1, mars 1985, p. 1-3. La préface originale, qui se trouvait dans le manuscrit autographe de Lonergan et qui fut envoyée chez Longman en mai 1954, a été publiée dans le même numéro de METHOD: Journal of Lonergan Studies, p. 3-7. b avantage pratique : Lonergan a réfléchi sérieusement à cette question; le manuscrit autographe porte une réponse --- biffée — beaucoup plus longue (elle fait six paragraphes). c progrès et déclin : le couple progrès-déclin occupe une place centrale très tôt dans les réflexions de Lonergan, comme en témoignent sa conférence « Insight Revisited » prononcée au Collège Jean-de-Brébeuf de Montréal en 1973 (version française sur ce site : Retour sur Insight) et les notes rédigées au cours de ses études (1933-1938), que l'on a découvertes après sa mort. Sa volonté de relier cette paire de termes au contexte actuel se manifeste dans le manuscrit autographe où un exposé initial est biffé et remplacé par les deux paragraphes de la présente version. d vingt-huit ans : c'est-à-dire depuis 1926, l'année où Lonergan entreprit ses études philosophiques à Heythrop College, en Angleterre. e ceux dont la contribution à mon ouvrage est plus tangible : Lonergan a enseigné au Collège de l'Immaculée-Conception à Montréal de l'été 1940 jusqu'à Noël 1946. C'est au cours de cette période qu'il s'est lié d'amitié avec le p. R. Eric O'Connor. Ce que Lonergan doit au p. O'Connor a souvent été souligné — par exemple dans l'hommage posthume rendu à ce dernier. Voir Lonergan Studies Newsletter 2, 1981, p. 2. Le p. Jos. Wulftange était étudiant en philosophie à Toronto en 1949-1950 et vivait cette année-là dans la communauté jésuite où se trouvait Lonergan. L'histoire de l'apport du p. Joseph Clark et du p. Norris Clarke est intéressante : ils enseignaient tous deux à l'école jésuite de philosophie à Plattsburgh (New York) où Lonergan se rendit pour les consulter, durant l'été de 1953 semble-t-il. Lonergan avait apporté son manuscrit. Le programme combinait loisirs et travail : lecture d'un chapitre le matin, natation l'après-midi et discussion en soirée sur le chapitre à l'ordre du jour. Les p. Crowe, Copleston et Godin ont pris connaissance du manuscrit déjà achevé; les deux derniers se trouvaient alors à Rome où ils enseignaient à l'Université Grégorienne à l'arrivée de Lonergan dans cette institution, à l'automne de 1953. Dans la première ébauche de la préface originale, Lonergan exprimait également sa reconnaissance à l'égard de Patrick Plunkett « qui s'est donné du mal (plutôt en vain, dois-je avouer à ma honte) pour extirper les solécismes de mon texte » ainsi qu'envers « une amie qui se trouvait bien placée pour imposer sa volonté de garder l'anonymat, après avoir assumé la longue tâche ardue de la dactylographie de mon manuscrit » (Beatrice Kelly); dans une note inscrite sur les épreuves, Lonergan exprimait aussi sa gratitude envers T. Michael Longman et ses associés (la note fut biffée, puis rétablie par un stet, mais n'a pas été publiée). f l'établissement d'un index : suit, dans la première version de la préface éliminée, une mention précise de la période que Lonergan a consacrée à la rédaction de l'ouvrage : juin 1949 à septembre 1953. 1 Bernard Lonergan, «The Concept of Verbum in the Writings of St. Thomas Aquinas», Theological Studies 7, 1946, p. 349-92; 8, 1947, p. 35-79, p. 404-44; 10, 1949, p. 3-40, p. 359-93. Ces articles ont été réunis en un volume sous le titre Verbum. Word and Idea in Aquinas, ed. David B. Burrell (Notre Dame: University of Notre Dame Press, 1967). L'ouvrage a été publié en français sous le titre La notion de verbe dans les écrits de saint Thomas d'Aquin, Paris, Beauchesne, 1966.
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