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Introduction à |
Brian McDonough Introduction Ce matin, lors de l’exposé de Jean-Louis Larochelle, nous avons pu constater la multiplicité, la diversité et la complexité des attitudes de nos contemporains face à l’existence humaine, à la quête de transcendance et au discours religieux.1 Ensuite, Pierrot Lambert a identifié pour nous des éléments dans la pensée de Jürgen Habermas, de Charles Taylor et de Bernard Lonergan qui indiqueraient comment le christianisme pourrait répondre aux défis actuels de l’existence humaine, et notamment à celui de la recherche de sens, d’authenticité et de solidarité. La fragilisation de la modernité et de son discours normatif Face à l’éclatement des repères et à la diversité des réponses, nous pouvons nous demander s’il y a une composante ou une dimension de l’existence humaine qui détient le droit à l’universalité et à la permanence.2 S’il est vrai que ce n’est pas la première fois que cette question est posée, nous devons constater qu’aujourd’hui dans la postmodernité, on ne peut plus faire appel au consensus fondé dans la culture classique et porté par la culture moderne. Dans la modernité, cette composante ou dimension de l’existence humaine était énoncée en propositions universelles, en vérités dites évidentes, et en certitudes connues naturellement.3 Pensons aux concepts de « Liberté, égalité, fraternité », affirmés par les grandes institutions républicaines. Ou encore, le concept de la « dignité humaine », dont le respect constitue le principe fondamental de la doctrine sociale de l’Église catholique. Mais Bernard Lonergan démontre que de telles propositions, exprimées en termes généraux et universels, ne peuvent jamais définir la réalité concrète dans ses détails.4 Pensons au contexte juridique. Si ces propositions sont bien enchâssées dans nos chartes et nos constitutions, les tribunaux sont appelés à investir beaucoup de temps et d’énergies à les interpréter, sinon à exiger leur amendement, pour assurer que leur application soit équitable. L’état peut mettre en place des mécanismes pour déterminer le bienfondé d’une demande de statut de réfugié, mais il y aura toujours des personnes vulnérables qui n’entrent pas dans les catégories définies et qui ont besoin de protection. Pensons au contexte économique. La maximisation du profit a été présentée comme un principe économique d’application universelle, évidente et naturelle, mais aujourd’hui on se demande si elle est souhaitable dans toutes les circonstances. Lonergan rappelle que ce qui était souhaitable chez les pionniers de l’industrie du début du 19e siècle peut être désastreux pour l’ordre social et environnemental aujourd’hui.5 Pensons à la controverse qui entoure la proposition de construire des pipelines pour faciliter le transport de sables bitumineux. Pour les uns, il s’agit de la meilleure façon d’expédier des ressources naturelles convoitées vers des marchés étrangers, à un coût intéressant. Pour les autres, il s’agit d’une contribution irresponsable à la production des gaz à effet de serre et alors aux changements climatiques qui mettent en danger le bien-être des générations à venir. Pour d’autres encore, il s’agit d’une transgression du caractère sacré de la création, d’une violation de la Terre-Mère. Pensons à la déréglementation des marchés boursiers et des institutions bancaires, au nom de l’efficacité et du rendement maximal. Ce qui était souhaitable pour les champions de cette déréglementation a mis en péril le système international des finances et a failli conduire à l’effondrement social et économique de plusieurs pays -- non seulement la Grèce, mais aussi une superpuissance comme les États-Unis. Pensons aux institutions comme le mariage et la famille. Si le Magistère de l’Église catholique continue d’affirmer que le mariage monogamique indissoluble, entre un homme et une femme, constitue l’unique forme authentique de la famille, cette position est loin de faire l’unanimité dans les sociétés contemporaines.6 Elle est contestée par un nombre croissant de catholiques, surtout chez ceux et celles qui ont vécu un divorce ou qui connaissent des couples homosexuels. La normativité se situe plutôt dans les opérations de l’esprit humain Devant l’effondrement de ces propositions dites universelles et la fragilisation de ces certitudes, Bernard Lonergan affirme que la composante normative et permanente de l’existence humaine réside dans les opérations mêmes de l’intentionnalité humaine. La normativité dans l’histoire se situe dans la nature, non pas conçue de façon abstraite, mais entendue comme opérante de façon concrète.7 À l’intention de ceux et celles qui ne sont pas très familiers avec la pensée de Lonergan, je voudrais présenter brièvement les opérations de l’intentionnalité humaine telles que comprises par Lonergan. J’espère que cet exposé vous permettra de situer le discours chrétien – et plus largement la quête de la transcendance ainsi que l’expérience religieuse – dans la structure opérante chez vous et chez moi, structure qui constituerait, selon Lonergan, un roc sur lequel nous pouvons bâtir des communautés qui permettent le dialogue, la promotion du bien pour tous les humains de façon concrète, et l’accueil de la diversité dans la recherche commune de la vérité et du réel.8 (En passant je vous inviterais à parcourir le livre d’introduction à la vie et à l’œuvre de Lonergan, écrit par mon ami Pierrot Lambert.) Une petite histoire, très actuelle Félix était à la recherche depuis un bon moment d’un emploi stable et rémunérateur. La pression se faisait davantage sentir depuis que sa conjointe Marie-Ève avait accouché de leur deuxième enfant. Un jour Félix reçoit une bonne nouvelle : son parrain, cadre à la Ville depuis longtemps, a réussi à le faire entrer au Service de la voirie. Félix, un homme débrouillard avec un certain entregent, est heureux à l’idée qu’il aura l’occasion de travailler avec le public. Il envisage déjà comment il pourra monter les échelons de la fonction publique municipale. Quelques mois après son arrivée en poste, il reçoit à son bureau un représentant d’une entreprise qui depuis des années fait la réfection des trottoirs et des rues pour la Ville. La rencontre se passe bien, le ton lors des négociations est tout à fait correct et même amical. Après avoir reconduit le représentant à la porte, Félix retourne à son bureau et, à son grand étonnement, il découvre parmi les documents et les contrats sur son pupitre, une enveloppe brune. Il l’observe attentivement et immédiatement des questions commencent à surgir dans son esprit. « Qu’est-ce que c’est? Est-ce que c’est quelque chose que le représentant a oublié – par accident? Qu’est-ce qu’il pourrait bien y avoir dans cette enveloppe? » En l’examinant, Félix constate que l’enveloppe n’est pas scellée et qu’elle contient un très grand nombre de billets de banque -- de couleur brune pâle, portant une photo d’un gentil monsieur avec une moustache blanche et qui ressemble à son arrière grand-père! De nouvelles questions surgissent qui font travailler l’intelligence de Félix. Soudainement il est saisi par une hypothèse qui expliquerait l’enveloppe mystérieuse et qu’il formulerait ainsi: « Le représentant a accidentellement oublié sur mon pupitre la paie de ses employés et sans doute il va bientôt revenir la chercher. » Mais Félix se voit confronté par des questions de réflexion. « Est-ce qu’une telle hypothèse pourrait être bien fondée? Oui ou non? Est-ce que je possède des éléments de preuve qui pourraient confirmer ou infirmer cette hypothèse? » À ce moment, Félix, qui est un grand admirateur de Sherlock Holmes, se rend compte qu’il n’est que lundi et que dans l’industrie de la construction la paie est distribuée plutôt vers la fin de la semaine, et normalement par dépôt automatique. Devant l’échec de cette hypothèse, Félix se trouve de nouveau devant la question brûlante : « Qu’est-ce que c’est? » Une nouvelle réponse surgit : « C’est un cadeau pour me souhaiter la bienvenue à mon nouveau poste à la Ville! » Félix réfléchit et se remémore les éléments de sa conversation avec le représentant et le ton amical qui régnait à l’occasion des négociations sur les prix et sur les échéanciers. « Oui, conclut Félix, c’est un cadeau pour moi. » Par cet acte de jugement, Félix sait enfin quelque chose : qu’en toute probabilité le représentant a voulu lui faire un beau cadeau. Mais ce jugement ne met pas fin aux opérations dans l’esprit de Félix. Il est maintenant préoccupé par une autre série de questions : « Qu’est ce que je vais faire? Quelle serait la bonne chose à faire dans ces circonstances? » Spontanément l’imagination de Félix se met en marche. Des fantasmes longtemps réprimés surgissent dans sa conscience : il se voit sur la Harley-Davidson FLHTC1 Electra Glide Classic, qu’il rêve de s’acheter, avec Marie-Ève enveloppée en cuir noir, s’agrippant à lui. Il s’imagine en train de traverser des paysages merveilleux, comme dans le film Easy Rider. Bientôt son imagination le ramène à des possibilités pragmatiques : avec ce cadeau – et d’autres qui sûrement lui seront faits bientôt par d’autres représentants d’entreprise – il pourrait finir le sous-sol de la maison qu’il vient d’acheter avec Marie-Ève. Mais devant ces possibilités, Félix sent un certain malaise, comme si sa conscience n’était pas tranquille. Il se demande si ces options ne sont pas marquées d’un brin d’égoïsme. Et si tous les fonctionnaires dans son Service acceptaient des cadeaux, est-ce que cela créerait des tensions avec les autres employés de la Ville et éventuellement avec les élus? Félix préférerait que son questionnement reste au niveau pratico-pratique, mais il ne peut s’empêcher de se poser des questions sur la signification des gestes de « grande générosité » à son égard, posés par des citoyens. Ses sentiments l’orientent vers un ensemble de valeurs9, d’abord de satisfaction de ses besoins vitaux, ensuite vers des valeurs sociales (comment il pourrait assurer également les besoins vitaux de ses proches) et vers des valeurs culturelles (quel est le sens et la valeur du vivre et du fonctionner), et finalement vers des valeurs personnelles (quelle sorte de personne veut-il être lui-même, quelle sorte de monde veut-il laisser à ses enfants) et vers des valeurs ultimes, qu’il ne sait pas trop comment formuler, mais qui lui ont été transmises par la culture depuis son enfance. Toute cette délibération commence à lui donner de sérieux maux de tête. Il ne sait pas ce qu’il devrait faire. Il décide qu’il en parlera avec son voisin de bureau lors de la pause pour savoir si lui aussi reçoit des cadeaux et ce qu’il en fait. Celui-ci lui informe que des cadeaux comme celui-ci font partie des avantages et, de plus, qu’il s’agit d’une pratique courante de distribuer de ces gros billets aux collègues de travail (comme lui) et de s’assurer aussi qu’une bonne pile se retrouve sur le bureau du chef du Service (qui s’avère être le parrain de Félix à qui celui-ci doit son poste!) D’abord rassuré, Félix commence à nouveau à ressentir un certain malaise. Que diraient ses enfants si un jour ils apprenaient qu’il acceptait de pots-de-vin, car il a compris enfin qu’il s’agissait bien de cela. Mais que devrait-il faire dans ces circonstances, surtout maintenant que le voisin de bureau est au courant? Il décide qu’il en parlera à Marie-Ève, quand il rentrera à la maison. En apprenant la nouvelle, Marie-Ève est toute contente. Ils pourront faire un dépôt pour l’achat d’un chalet qu’elle lorgne et qui est situé à côté de la belle propriété que sa sœur vient d’acheter au bord d’un lac dans le Nord. Félix est de plus en plus confus. Il se demande si garder l’argent est vraiment la meilleure chose à faire dans les circonstances. Il a besoin de trancher, et pour cela d’opter pour un oui ou pour un non! Une analyse de ce qui s’est passé dans l’esprit de Félix Je vous invite à vous référer au tableau intitulé « La dynamique de la créativité, selon Bernard Lonergan », en Annexe A. Examinons les opérations qui se sont réalisées en Félix et comment elles structurent son intentionnalité. Rappelez-vous que, selon Lonergan, ces opérations sont normatives et constituent le roc sur lequel l’on peut bâtir le projet humain.10 Félix voit parmi les documents sur son pupitre une enveloppe brune, ce qui attire son attention et suscite des questions d’intelligence: « Qu’est-ce que c’est? » Ces questions reviennent avec plus d’insistance lorsque Félix observe que l’enveloppe, non scellée, contient des billets de banques de grande valeur. Ces questions génèrent chez Félix des insights (des saisies) et spontanément il se met à formuler des hypothèses11. Cette conscience intellectuelle chez Félix est orientée vers l’intelligibilité : il veut comprendre. Mais cela ne suffit pas. Félix a besoin de savoir si les hypothèses qu’il a formulées sont fondées ou pas. Spontanément il se pose des questions de réflexion : « Est-ce que l’enveloppe brune est vraiment un cadeau pour moi? Est-ce que j’ai besoin de plus de preuves pour confirmer cette hypothèse? » Lorsque toutes les conditions pertinentes sont satisfaites, spontanément Félix arrive à un jugement de fait : « Oui, l’enveloppe brune est probablement un cadeau que le représentant a voulu me laisser. » Cette conscience rationnelle chez Félix est orientée vers la vérité, vers le réel. Les trois opérations successives – la réceptivité attentive, la compréhension intelligente et le jugement raisonnable – constituent à elles trois la structure cognitive de l’intentionnalité humaine. Mais, comme nous l’avons vu, une autre série de questions se présente à l’esprit de Félix, des questions de délibération et d’évaluation : « Qu’est-ce que je vais faire? Est-ce que c’est la meilleure chose à faire dans ces circonstances? »12 Félix devra faire face à la présence à l’intérieur de lui-même de distorsions ou de déviations – d’ordre dramatique, d’ordre individuel, de collectivité, et du « bon » sens commun13 – qui pourraient empêcher de considérer certaines options comme valables14. Félix devra arriver à un jugement de valeur, ce qui le conduira à prendre une décision sur ce qui serait bien, non pas en général ou dans l’abstrait, mais dans les circonstances particulières – car le bien doit être toujours concret15. Rappelons-nous comment, dans la prise de décision responsable, les sentiments ont orienté Félix vers des valeurs, selon une échelle de préférence. Cette conscience existentielle, par laquelle Félix se construit non seulement lui-même mais aussi sa réalité, vise ultimement ce qui a de la valeur, ce qui serait bien. Les opérations de compréhension intelligente, de jugement raisonnable et de prise de décision responsable visent respectivement l’intelligibilité, la vérité ou le réel, et le bien ou ce qui a de la valeur – ce que Lonergan appelle « les concepts transcendantaux ».16 Les concepts transcendantaux et l’expérience d’être en amour L’intelligibilité, la vérité ou le réel, et le bien ou ce qui a de la valeur, visés par les opérations de l’intentionnalité humaine, démontre comment l’être humain est caractérisé par le dépassement de soi. Lonergan explique : « Toute interrogation nous conduit dans l’inconnu et toute réponse contribue à notre devenir. Quand je me demande : Pourquoi? Comment? Pour quoi faire? je vise l’intelligibilité, mais la question serait oiseuse si je connaissais déjà l’intelligibilité en cause. Quand je me demande si ceci ou cela est vraiment ainsi, je vise le vrai et le réel, mais je ne sais pas encore ce qui est vrai et ce qui sera signifié en vérité. Quand je me demande si tel ou tel projet, si telle ou telle entreprise est réellement valable, je vise le bien, mais je ne sais pas encore ce qui serait bien et, en ce sens, ce qui serait valable.»17 Notez comment ces opérations de l’intentionnalité humaine forment une séquence : chacune d’entre elles prend la relève là ou la précédente abandonne. Ce mouvement, plus profond et plus englobant que les opérations qui le composent, ne peut trouver son repos au-delà de toutes ces étapes. Pour Lonergan, ce qui se situe au-delà est le fait d’être en amour, « état dynamique qui élève tout ce qui précède, principe de mouvement à la fois purificateur et illuminateur et principe de repos grâce auquel l’union s’accomplit. »18 S’inspirant d’Aristote, Lonergan affirme que l’esprit humain ne trouvera pas nécessairement le repos auquel il aspire dans un ordre social -- aussi bénéfique que ceci puisse être. Non, l’esprit humain nous conduirait ultimement à l’expérience d’être en amour. Être en amour peut prendre des formes différentes. Pensons à l’amour que Félix éprouve pour Marie-Ève et pour ses enfants : il porte en lui une préoccupation réelle pour leur avenir et pour leur bien-être. Pensons à l’amour qui se traduit par l’engagement à établir un ordre social marquée de justice et de compassion.19 Pour le mystique et théologien catholique qu’est Bernard Lonergan, l’expérience d’être en amour sera décrite en empruntant le langage de Saint Paul : l’amour de Dieu qui vient de Dieu, et qui est répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous est donné » (Romain 5,5). Lonergan va parler d’une perception de la valeur transcendante qui consisterait « à expérimenter que l’élan illimité qui nous pousse à nous dépasser nous-mêmes est comblé. »20 Cette perception de la valeur transcendante actualiserait notre orientation vers le mystère de l’amour. Lonergan écrit: « Puisque cet élan est celui de l’intelligence vers l’intelligence, de la raison vers le vrai et la réel, de la liberté et de la responsabilité vers le vrai bien, l’expérience que cet élan est comblé, avec l’absence de restriction qui le caractérise, peut être objectivée comme la manifestation voilée d’une intelligence et d’une intelligibilité absolue, d’une vérité et d’une réalité, d’une bonté et d’une sainteté également absolues. À la faveur de cette objectivation, la question de Dieu réapparaît sous une forme nouvelle. » 21 L’expérience religieuse, selon Lonergan L’expérience religieuse est celle de l’amour de Dieu, sans limites et sans réserves. Comme expérience d’amour, elle agit principalement sur la conscience existentielle en orientant le sujet vers le dépassement de soi, dans ses jugements de valeur et donc dans ses prises de décisions. Il ne s’agit pas de considérations sur l’existence ou sur la nature de Dieu, mais plutôt d’une relation où l’aimé est invité à répondre à l’invitation à danser de l’amant : « Vais-je l’aimer en retour, ou vais-je refuser? Vais-je accueillir le don de son amour, ou vais-je reculer, me détourner, m’esquiver? »22 Lonergan prend beaucoup de peine pour montrer que cette expérience d’amour religieux précède le langage et les catégories de la tradition chrétienne.23 Pour cela, il fait appel à Raimun Panikkar, un philosophe dont le père était hindou et la mère catholique, qui propose des catégories qui échappent à des superstructures interprétatives offertes par les religions, et qui pourraient rejoindre non seulement les personnes croyantes mais aussi celles qui sont athées, agnostiques ou indifférentes au discours religieux.24 Lonergan fait alors une distinction entre cette expérience fondamentale d’amour comme don de Dieu (ce que Lonergan associe avec la notion de « foi ») et les croyances d’une tradition religieuse particulière. Tout en reconnaissant que des croyances peuvent être différentes, il affirme que cette diversité recouvre une unité plus profonde.25 Revenons au tableau intitulé « La dynamique de la créativité, selon Bernard Lonergan », en Annexe A. Dans l’expérience religieuse, Dieu se communique lui-même par l’amour. En se révélant ainsi, Dieu fait son entrée dans l’histoire26 et participe à la constitution de l’humain par l’humain. Dans l’expérience religieuse, Dieu affirme un droit de parole sur la direction et sur les orientations du développement des vies humaines, des sociétés humaines, des cultures humaines et de l’histoire de l’humanité dans son ensemble.27 Lorsque cette parole est intérieure, elle prendra la forme d’un don venant de Dieu (Romains 5,5) et elle produira chez la personne des changements d’orientations de vie, manifestés par l’amour, la joie, la paix, la compassion, la bonté, la fidélité, la douceur et la maîtrise de soi. (Galates 5,22). Lorsque cette parole est extérieure, elle se communiquera par des symboles, par le langage, en faisant mémoire de la vie de grands témoins et de grands événements dans l’histoire d’une tradition religieuse.28 (Félix, par exemple, avait tiré grand profit d’une biographie populaire de Giuseppe « Pino » Puglisi, un curé d’une paroisse en Sicile qui avait tenu tête à la Mafia et qui en a payé de sa vie.29) L’expérience de l’amour divin fera naître dans la personne une forme de connaissance engendrée par la foi religieuse.30 Celle-ci oriente les personnes vers le dépassement de soi. Elle fait reconnaître la valeur d’accueillir les jugements de valeur et de fait, proposés par une tradition religieuse.31 Si l’expérience religieuse agit particulièrement sur la conscience existentielle, en orientant le sujet vers le dépassement de soi dans sa prise de décision32, elle pénètre aussi sa réceptivité aux données, sa compréhension intelligente et son jugement rationnel.33 Retournons à l’histoire de Félix L’hésitation de Félix à jouer le jeu et à distribuer les billets qu’il avait trouvés dans l’enveloppe brune, provoque une méfiance grandissante chez ses collègues de travail. Pour certains, Félix présente un réel danger. Pour se protéger, ils propagent la rumeur selon laquelle c’est Félix qui a sollicité les pots-de-vin. Le climat au bureau devient insoutenable pour Félix et son parrain ne manifeste aucun intérêt à le défendre. Félix démissionne, sa réputation est entachée de soupçons et d’allégations. Marie-Ève reproche à Félix de ne pas avoir simplement pris l’argent et de ne pas avoir su s’intégrer à la culture de ce milieu professionnel. Ses rêves d’acheter le chalet à côté de celui de sa sœur dans le Nord s’évaporent, ainsi que toutes manifestations d’affection envers Félix. Celui-ci se voit obligé de dormir sur le divan dans le salon, et bientôt dans une maison de chambre piteuse. La vie de Félix semble aller de mal en pire. Il souffre énormément de ne plus voir ses enfants sur une base régulière. Personne ne semble vouloir lui offrir un emploi sérieux. Il pense que son nom figure sur des listes noires. Et pourtant Félix ressent une certaine satisfaction d’avoir refusé de jouer le jeu. À force de se rappeler les événements du lundi en question, il est devenu conscient de lui-même comme un sujet qui pose des questions, pour mieux comprendre une situation et pour arriver à de bons jugements. Maintenant il peut s’affirmer comme un sujet, qui sait qu’il sait, et qui sait comment il sait – ce qui produit en lui une sensation de son identité unique34 et une conviction qu’il a enfin trouvé un roc solide sur lequel il peut dorénavant construire sa vie.35 De plus, lorsqu’il a transmis quelques jours après l’enveloppe brune à un cadre supérieur, il est devenu conscient qu’il avait pris cette décision au nom de valeurs qu’il n’avait pas appréciées auparavant. Sa décision avait produit en lui une expérience de paix et de sérénité, même s’il a appris par la suite que le cadre en question avait déposé l’argent dans la caisse électorale d’un membre influent du conseil municipal. Félix demeure en paix avec lui-même.36 Il sait que les valeurs qui l’animent ne sont pas déterminées par les autres, mais l’ouvrent sur une toute autre dimension qui dépasse l’éthique courante. Homme libre en dépit de ses souffrances et de ses difficultés37, Félix se demande s’il y a une intelligibilité absolue (en dépit de la situation absurde dans laquelle il se trouve), s’il y a une vérité absolue (en dépit des mensonges et des fausses accusations qui ont détruit sa réputation), s’il y a une valeur absolue (en dépit des notions contradictoires de ce qui constitue le bien). Pour la première fois, Félix se pose la question de Dieu.38 La conversion intellectuelle de Félix Le fait que l’enveloppe brune soit vue sur le pupitre de Félix par son voisin de bureau avait suffi aux collègues de travail (mécontents de ne pas avoir reçu une partie du butin) pour monter une histoire de collusion qui mènerait à l’exclusion de Félix. Pour eux, la présence de l’enveloppe constituerait aux yeux de la direction une preuve « objective » de la collusion de Félix; aucune explication de sa part ne pourrait être admise pour arriver à une meilleure compréhension de la situation et pour savoir ce qui s’était vraiment passé. Pour la direction, la réalité se réduit à ce qui a pu être observé par le voisin de bureau. Pour Félix, la réalité ne se réduit plus à la simple observation. Sans nier qu’il avait vu l’enveloppe brune sur son pupitre, il se rappelle qu’il avait tenté de comprendre ce que sa présence pouvait signifier avant de réaliser qu’il s’agissait bien d’un pot-de-vin. L’objectivité exige l’interaction non seulement de la réception de données oculaires, mais aussi de la compréhension et du jugement – un processus qui conduit au dépassement de soi.39 La conversion morale de Félix Pour certains des collègues de travail de Félix, le choix d’accepter des cadeaux de la part d’entrepreneurs en relation contractuelle avec la Ville était motivé par la satisfaction des désirs : ils désiraient le style de vie de leurs patrons et ils estimaient qu’ils en étaient injustement privés40. De plus, les cadeaux faisaient partie de la « game », de la « tradition », et personne ne s’en plaignait : pourquoi mettre fin à une bonne chose?41 Quand Félix a transmis l’enveloppe au cadre supérieur, il savait qu’il faisait un choix au nom de valeurs qui l’opposeraient aux attentes de ses collègues et de sa chère Marie-Ève. La liberté a cessé d’être un concept abstrait pour devenir une décision par laquelle il construit et sa personne et le monde qu’il laissera à ses enfants.42 Sa décision a provoqué en lui un désir d’examiner et éventuellement de se défaire de certaines distorsions ou déviations que cette affaire avait révélées. La tâche est exigeante, car, « On doit encore démasquer et corriger ses déviations aux plans individuel, collectif et général. On doit continuer à développer sa connaissance de la réalité et du potentiel humain tels qu’ils existent dans la situation présente. On doit maintenir une distinction entre les éléments de progrès et les éléments de déclin que comporte cette situation. On doit scruter sans répit ses réponses intentionnelles aux valeurs et leur échelle implicite de préférence. On doit prêter attention aux critiques et aux protestations, et on doit rester disposé à apprendre des autres. Car la connaissance morale appartient en propre uniquement aux hommes moralement bons et, jusqu’à ce qu’on ait mérité ce titre, il faut savoir toujours progresser et apprendre."43 La conversion religieuse de Félix La conversion religieuse résulte de l’accueil inconditionnel de l’expérience religieuse, dont nous avons déjà discuté. « La conversion religieuse transforme le sujet existentiel pour en faire un sujet en amour, un sujet saisi, captivé, envoûté et possédé par un amour total et donc transmondain. »44 Félix n’est pas rendu à ce point dans son cheminement personnel. Pourtant il peut affirmer que son cœur a été transformé dans cette épreuve : un cœur de pierre a été remplacé par un cœur de chair – ce que Thomas d’Aquin appelle la grâce opérative. Son cœur de chair est maintenant davantage disposé, dans l’exercice de sa liberté, à promouvoir la justice et la compassion – ce que Thomas d’Aquin appelle la grâce coopérative. La conversion religieuse dispose Félix au dépassement de soi, non seulement dans la poursuite de la vérité et dans l’actualisation de valeurs humaines, mais aussi dans son orientation fondamentale par rapport à l’univers.45 La conversion religieuse lui donne aussi la capacité d’amour qui lui permettra d’accepter les souffrances qui accompagneront nécessairement ses décisions de lutter contre la corruption et de contrer le déclin humain.46 Les collègues de travail ne sont pas seulement complices du mal au plan éthique, mais aussi ils contribuent à éteindre l’amour dans le monde. Selon Lonergan, «Il constitue une dimension radicale du non-amour (lovelessness). On peut se dissimuler à soi-même cette dimension en restant constamment superficiel, en évitant les questions ultimes, en se laissant absorber dans tout ce que le monde offre à l’homme pour mettre au défi ses ressources, pour détendre son corps et pour distraire son esprit. Mais cette fuite peut n’être que temporaire et l’absence de plénitude se manifeste alors dans l’insatisfaction, l’absence de joie, la poursuite du plaisir, l’absence de paix, dans le dégoût – dégoût dépressif de soi-même ou dégoût maniaque, hostile, voire violent de l’humanité.»47 L’expérience religieuse transforme notre monde Nous avons tenté de démontrer comment les structures de l’intentionnalité humaine, telles qu’identifiées par Bernard Lonergan, constituent la composante d’existence humaine qui détient l’universalité, la permanence et la normativité.48 De ce fait, elles remettent en question certaines prétentions de la modernité qui situe la normativité dans des propositions universelles et des vérités dites évidentes. Nous avons tenté de démontrer que l’expérience religieuse, telle que présentée par Bernard Lonergan, trouve une place dans la structure des opérations de l’intentionnalité humaine. L’expérience religieuse, avons-nous dit, est l’expérience de l’amour de Dieu, sans limites et sans réserves. Elle agit principalement sur la conscience existentielle en orientant le sujet vers le dépassement de soi, dans ses jugements de valeur et par conséquence dans ses prises de décision. Elle apporte aussi des données qui alimentent la conscience intellectuelle et la conscience rationnelle. Elle donne naissance à une forme de connaissance que Lonergan associe à la foi religieuse. (Voir encore une fois le Tableau en Annexe A.) Elle contribue alors à un processus dynamique, cumulatif et créatif qui répond concrètement à des besoins humains. En dissolvant les déviations ou distorsions49 , elle permet le bon fonctionnement des opérations d’intentionnalité humaine, et affirme la normativité de celle-ci.Nous avons vu comment l’expérience religieuse peut faciliter un exercice de liberté qui soit non seulement horizontal, mais même vertical. Lorsqu’un exercice vertical de liberté est explicite, le sujet humain (à partir de sa conscience existentielle) répond à la notion transcendantale de « valeur », en déterminant ce qui est « valable » à faire pour soi-même et pour autrui. Ainsi, le sujet formule un idéal de ce qui constitue une vie bien vécue et s’engage à réaliser cet idéal. L’exercice vertical de liberté constitue le fondement des jugements de valeur requis dans la prise de décision responsable. Une personne, confrontée à une situation comme celle de Félix, choisit, dans l’exercice vertical de sa liberté, un idéal de ce que c’est que d’être un humain, un père de famille, un citoyen et un employé au service du public. Cet idéal constituera la référence dans ses jugements de valeur et dans ses décisions. Lorsque ses jugements et ses décisions ne correspondront pas à cet idéal, le sujet sentira un malaise; lorsque ses jugements et ses décisions correspondront à celui-ci, le sujet sentira une paix intérieure, comme c’était le cas de Félix après qu’il a rendu l’enveloppe brune au cadre supérieur.50 L’expérience religieuse permet de façon radicale l’élargissement et l’approfondissement de l’horizon, c’est-à-dire de ce qui nous intéresse.51 Pour Lonergan, « Le bien humain se voit absorbé dans un bien qui englobe tout. Là où auparavant, une explicitation du bien humain mettait les hommes en relation les uns avec les autres et avec la nature, la préoccupation humaine s’étend maintenant, par-delà le monde de l’homme, à Dieu et au monde de Dieu. »52 L’expérience religieuse conduit à l’enrichissement de la notion du développement humain, car celui-ci ne porte plus seulement sur des habiletés et des vertus, mais également sur la sainteté. « La puissance de l’amour de Dieu confère à toute bonté une énergie et une efficacité nouvelles… »53 L’expérience religieuse alimente une espérance individuelle et collective, car « l’espoir humain ne s’arrête plus au tombeau. »54 Selon Lonergan, « La foi situe les efforts humains dans un univers amical; elle révèle l’importance ultime des réalisations humaines; elle renforce la confiance que l’on met dans les nouvelles entreprises. »55 L’expérience religieuse pointe vers une solution au problème de la liberté humaine et du mal56. Grâce à ce regard d’amour, on peut reconnaître que les hommes sont libres et appelés à une authenticité supérieure qui vainc le mal par le bien.57 Dans d’autres écrits, Lonergan présente cette authenticité comme étant fondée sur « la loi mystérieuse de la croix ». Elle conduit à la possibilité du pardon réel, et non pas seulement d’une amnistie.58 Elle sous-tend les dynamiques de guérison et de libération que j’ai tenté d’identifier lors de mon intervention - à notre colloque de l’année passée- en analysant des rencontres entre personnes incarcérées et victimes de violence. L’expérience religieuse contribue au progrès social, car la foi et le progrès prennent tous deux racine dans le dépassement de soi grâce à la conversion intellectuelle et à la conversion morale.59 L’expérience religieuse renverse le processus de déclin social60. Pour Lonergan, ce n’est ni la propagande ni la discussion, mais plutôt la foi religieuse qui libère la rationalité humaine de ses prisons idéologiques. « … si les maux ne doivent être ni exacerbés, ni ignorés ni seulement enrayés, mais reconnus et enlevés, il faut que l’orgueil de l’homme et son désir de posséder laissent place à la charité religieuse, à la charité du serviteur souffrant, à l’amour de celui que se sacrifie lui-même. »61 Les dernières nouvelles de Félix Depuis son adolescence, Félix a tendance à boire de l’alcool quand les choses vont mal. Avec la perte de son emploi et depuis que Marie-Ève ne veut plus rien savoir de lui, et que de plus elle rend compliquées ses visites auprès de ses enfants, Félix lutte contre la dépression – et cela malgré les prises de conscience qu’il a réalisées et malgré les conversions importantes qu’il a pu vivre. Les emplois précaires qu’il obtient ne règlent pas ses difficultés financières. Son logement est petit et insalubre. Félix commence à boire beaucoup et il s’est fait remercier par ses patrons. Lorsqu’il se réveille le matin, chaque cellule de son corps réclame de l’alcool. Il commence à fouiller dans les poubelles pour trouver des bouteilles et des cannettes consignées. Il est rendu à passer la journée à rechercher celles-ci. Quand il veut s’arrêter, il sent derrière lui ce qu’il décrit comme un énorme oiseau noir, qui le bat avec ses ailes anguleuses et le pousse violemment, pour trouver ce qui lui permettra de se procurer sa prochaine pinte de Molson Dry. Un jour il n’en peut plus. Un intervenant de la Maison du Père lui suggère fortement d’assister à des rencontres des Alcooliques anonymes. Lors d’un des premiers « meetings » auxquels il assiste, il voit son ancien voisin de bureau : il n’aurait jamais soupçonné que celui-ci aurait, comme lui, perdu la maîtrise de sa vie à cause de la boisson. Lors des partages d’expériences et d’émotions, il est étonné de voir comment il arrive à ressentir de la compassion et de l’empathie pour cette personne qui lui a causé tellement de tort. Ils s’échangent des cigarettes. Félix étudie les douze étapes. Il en conclut que seulement avec l’aide d’une Puissance supérieure il saura sortir de sa dépendance. Il décide de confier sa volonté et sa vie à Dieu. Il entreprend un inventaire moral approfondi et demande à Dieu de le guérir de ses défauts de caractère. Tout comme quand il avait pris la décision de donner l’enveloppe brune au cadre supérieur, Félix ressent en lui une paix, qui est certes nourrie par la prière de la sérénité. Peu à peu Félix récupère sa conscience de lui-même comme sujet capable de poser de bons jugements de valeur. Il recommence à croire en lui-même et en la possibilité qu’il sorte de sa dépendance. Il commence à mieux comprendre quels sont les éléments qui déclenchent en lui le besoin de consommer et il développe des stratégies pour les éviter. Il commence à rebâtir sa vie. Une analyse de ce qui est en train de se passer chez Félix L’authenticité, rappelle Lonergan, consiste à abandonner l’inauthenticité, mais cet abandon n’est jamais total et demeure toujours précaire.62 Je vous invite à vous référer au tableau intitulé « La dynamique de la guérison, selon Bernard Lonergan », en Annexe B. Cette dynamique vient compléter celle de la créativité à laquelle nous avons fait beaucoup référence dans cet exposé. Ces dynamiques permettent le développement humain63. Notez comment l’état d’être-en-amour est à l’origine de la dynamique de la guérison, mais constitue le terminus de la dynamique de la créativité. Les étapes dans la dynamique de guérison – une dynamique que Lonergan décrit dans des articles rédigés plutôt vers la fin de sa vie -- ressemblent beaucoup aux étapes faisant partie du programme de rétablissement suggéré par les AA. À un certain moment, Félix se tourne vers Dieu – il constate qu’il n’a pas le choix. Dans sa pauvreté et sa détresse personnelles, ce n’est pas tant la grandeur de Dieu qu’il ressent, mais la tendresse et l’amour de Dieu à son égard – ce qui ressemble beaucoup à l’expérience religieuse. Il connait intimement ce que Lonergan appelle la conversion religieuse. L’amour qu’il ressent lui permet de transformer la haine et le ressentiment qu’il éprouvait envers son ancien voisin de bureau en compassion et en empathie. Selon Lonergan, « Là où la haine tourne en rond en cercles vicieux de plus en plus étroit, l’amour brise les chaines des déterminismes psychologiques et sociaux, avec la conviction de la foi et la puissance de l’espérance. »64 Son expérience de l’amour de Dieu versé dans son cœur par l’Esprit lui permet de percevoir des valeurs et de croire en de nouvelles possibilités. Il commence à mieux se comprendre lui-même, ses déviations et celles des autres, et la réalité dans laquelle il se trouve. Il sait qu’il est en mesure de se reconstituer comme homme, comme père et comme citoyen et de continuer à bâtir le monde. Cette nouvelle compréhension est confirmée par des expériences intérieures. Ainsi Félix reprend peu à peu le chemin de la créativité.
Annexe A: « La dynamique de la créativité, selon Bernard Lonergan » Annexe B: « La dynamique de la guérison, selon Bernard Lonergan » 1 Bernard Lonergan avait anticipé certains des éléments de l’analyse offerte par Jean-Louis Larochelle. Voir notamment dans Pour une méthode en théologie, pp 278-79; Method in Theology (dorénavant MT), p. 243-44. 2 « Le droit naturel et la mentalité historique », Les voies d’une théologie méthodique, p. 214 3 Pensons au deuxième paragraphe de la Déclaration d’indépendance des États-unis, signée le 4 juillet 1776 : « We hold these truths to be self-evident, that all men are created equal, that they are endowed by their Creator with certain unalienable Rights, that among these are Life, Liberty and the pursuit of Happiness… » 4 « La conscience religieuse contemporaine », Les voies d’une théologie méthodique, p. 79 5 Ibid, p. 80; « Créativité, guérison et histoire », Les voies d’une théologie méthodique, p. 230 6 Compendium de la Doctrine sociale de l’Église, 229. 7 « Le droit naturel et la mentalité historique », Les voies d’une théologie méthodique, p. 214 8 « Si vous arrivez à comprendre à fond ce que c’est que comprendre, non seulement comprendrez-vous les grandes lignes de tout ce qu’il y a à comprendre, mais vous allez également posséder une base fixe, une configuration invariante débouchant sur tous les développements ultérieurs de la compréhension. », L’Insight : Étude de la compréhension humaine, p. 19; Insight : A Study of Human Understanding, p. 22. 9 Pour une méthode en théologie, p. 46; MT, p. 32. 10 Pour une méthode en théologie, pp 33-34; MT, pp. 19-20. 11 « Dans tout ce processus cumulatif de saisies, le plus important à comprendre, c’est que chaque saisie est en rapport au concret et que le processus cumulatif est orienté vers une vision de plus en plus complète et adéquate. » Voir «Créativité, guérison et histoire », Les voies d’une théologie méthodique, p. 232. 12 Notez comment les questions de délibération et d’évaluation dans la structure existentielle sont modelées sur les questions d’intelligence et de réflexion dans la structure cognitive. Les questions d’évaluation, tout comme les questions de réflexion, exigent comme réponse un simple oui ou non, sinon elles renvoient le sujet à la recherche d’autres preuves. 13 C’est-à-dire les distorsions ou déviations causées par une préoccupation pour les avantages à court terme, sans tenir compte des conséquences à long terme. Voir L’Insight, pp. 238-57 ; Insight, pp. 244-263. Voir aussi «Créativité, guérison et histoire », Les voies d’une théologie méthodique, p. 232. 14 Pour une méthode en théologie, pp 70-72; MT, p. 53-55. 16 Pour une méthode en théologie, pp 24-25; MT, pp. 11-12. Lonergan rappelle que ces concepts sont heuristiques : ils demeurent vagues et abstraits et ils n’indiquent pas comment ils pourraient se réaliser dans les circonstances et ce que leur réalisation concrète impliquerait. Voir «Créativité, guérison et histoire », Les voies d’une théologie méthodique , p. 231. 17 « Le droit naturel et la mentalité historique », Les voies d’une théologie méthodique, p. 216. 18 « Le droit naturel et la mentalité historique », Les voies d’une théologie méthodique, p. 217. 19 Pour une méthode en théologie, p. 127; MT p. 105. 20 Pour une méthode en théologie, p. 138-39; MT, pp. 115-16. 21 Ibid. pp. 138-139; MT, pp. 115-16. 24 « Métathéologie ou théologie diacritique comme théologie fondamentale », Concilium, 46 (1969), p. 45, cité par Lonergan dans « La conscience religieuse contemporaine », Les voies d’une théologie méthodique, p. 87. Lonergan se réfère aussi à Pierre Teilhard de Chardin dont la pensée et l’exemple continuent d’inspirer plusieurs à préciser leurs aspirations les plus profondes. Ibid. p. 86. 25 Pour une méthode en théologie, p. 143; MT, p. 119. 27 "Divine revelation is God’s entry and his taking part in man’s making of man. It is God’s claim to have a say in the aims and purposes, the direction and development of human lives, human societies, human cultures, human history." (from "The Transition from a Classicist World View to Historical Consciousness") 28 Pour une méthode en théologie, p. 134-36; MT, pp 112-13. Lonergan rappelle à la p. 142 (MT, p. 119) que la parole extérieur, tout comme la parole intérieure, vient de Dieu. 29 Le père Giuseppe Puglisi sera canonisé le 25 mai 2013. 30 «La foi … situe toutes les autres valeurs dans la lumière et dans l’ombre de la valeur transcendante. Dans son ombre, car cette dernière est suprême et incomparable. Dans son ombre, car cette dernière est suprême et incomparable. Dans sa lumière, car elle s’allie à toutes les autres valeurs pour les transformer, les magnifier, les glorifier. Sans la foi, la valeur originaire est l’homme, et la valeur terminale le bien humain que l’homme réalise. Mais à la lumière de la foi, la valeur originaire devient la lumière et l’amour de Dieu, tandis que la valeur terminale devient l’univers entier. Ainsi, le bien humain se voit absorbé dans un bien qui englobe tout. Là où, auparavant, une explicitation du bien humain mettait les hommes en relation les uns avec les autres et avec la nature, la préoccupation humaine s’étend maintenant, par-delà le monde de l’homme, à Dieu et au monde de Dieu.» Pour une méthode en théologie, p. 139; MT, p.116 -17. 31 Pour une méthode en théologie, p. 141 et p. 278; MT, p. 118 and p 243. 32 Ibid., p. 129; MT, pp. 106-07. 34 Voir L’Insight, au chap. 11 « L’affirmation de soi du sujet connaissant ». Cette sensation peut être associée à ce qu’on appelle couramment l’empowerment. 35 Pour une méthode en théologie, p. 33; MT p. 19 37 Félix semble avoir réalisé un exercice vertical de liberté : ses jugements et ses décisions ont approfondi, élargi et enrichi l’horizon de ses intérêts et de ses connaissances. Pour une méthode en théologie, pp. 267-71; MT, pp. 235 -237. 38 Pour une méthode en théologie, p. 125; MT, p. 103. 39 Pour une méthode en théologie, p. 273; MT, p. 239. 40 Une telle frustration, lorsqu’elle se répand, conduit à ce qu’Arnold Toynbee appelle le désenchantement et annonce la désintégration d’une civilisation. Voir «Créativité, guérison et histoire », Les voies d’une théologie méthodique , p. 232. 41 Dans la mesure où l’on prend une « tradition » inauthentique, telle qu’elle se présente, pour sa règle, on ne pourra rien faire d’autre que de réaliser l’inauthenticité de manière authentique : Pour une méthode en théologie, p. 99; MT, p. 80. 42 Par la conversion morale, Félix devient une valeur originaire : voir Pour une méthode en théologie, p. 276 ; MT, p 242. Pour mieux comprendre comment l’on devient une valeur originaire: voir Ibid., p. 66-67; MT p. 50-51. Pour apprécier l’impact de la foi religieuse sur les valeurs originaires et terminales, voir ibid,, p.139; MT, p. 116. 43 Pour une méthode en théologie, p. 275; MT, p. 240. 47 Ibid., p. 277-78; MT, p. 243. Pensons au film de Denys Arcand, « Le déclin de l’empire américain ». 48 Ibid., p. 27-34; MT, p. 13-20 49 « Créativité, guérison et histoire », Les voies d’une théologie méthodique, p. 234. 50 Pour une méthode en théologie, pp. 55-56; MT, pp. 40-41 51 Ibid., pp. 269-71; MT pp. 235-237. 56 Sur cette question fondamentale, voir le chapitre 20 de L’ Insight . 57 L’expérience religieuse, selon Lonergan, favorise le dépassement de soi, pour faire accéder non seulement à la justice mais à l’amour d’abnégation. Elle exercera un rôle rédempteur dans la société humaine « en autant qu’un tel amour peut réparer le tort causé par le déclin et relancer le processus cumulatif du progrès. » Pour une méthode en théologie, p.72; MT, p. 55. 58 L’expérience religieuse sous-tend les dynamiques de guérison et de libération que j’ai tenté d’identifier lors de mon intervention au Colloque de 2012, en analysant les rencontres entre personnes incarcérées et victimes de violence. 59 «Le progrès réalise les capacités de l’homme et de la nature; il révèle que l’homme existe pour instaurer, en ce monde, une perfection toujours plus complète. » Ibid., p. 140; MT p. 116. 60 «Créativité, guérison et histoire », Les voies d’une théologie méthodique, p. 233. 61 Pour une méthode en théologie , p. 140; MT p. 116. 62 Pour une méthode en théologie, p. 323; MT, p.284. 63 « Créativité, guérison et histoire », Les voies d’une théologie méthodique, p. 233. |